http://lachapelledupurgatoire.eklablog.com/maria-anna-lindmayr-et-le-purgatoire-a25084998
wikipedia
http://de.wikipedia.org/wiki/Maria_Anna_Lindmayr
http://mondieuetmontout.com/Menu-Marie-Anne-Lindmay-Ames-Du-Purgatoires.htm
Traité du Purgatoire
de sainte Catherine de Gênes
http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/CdeGenes/Purgatoir.html
https://sites.google.com/site/jilboudo2012/conferences/conference-regard-sur-le-purgatoire-la-priere-pour-les-ames-du-purgatoire-un-chemin-de-saintete-ilboudo-jean-de-la-theotokos-s-j
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Marie Anne Lindmayer : « Mes relations avec les âmes du Purgatoire.
Par une permission spéciale de Dieu, Marie-Anne Lindmayr
(1657 - 1726)fut en relation avec les âmes du Purgatoire.
Elle reçut maintes précisions sur la cause, la nature et la
durée de leurs souffrances, sur ce qu'a d'horrible le péché, sur l'intensité et
la durée de son expiation... et enfin sur la manière dont les âmes brûlantes du
Purgatoire languissent loin de ce Dieu, infiniement saint, objet de tous leurs
désirs.
Marie-Anne a enduré des souffrances indicibles pour les
délivrer..
Pourquoi Marie-Anne a dû écrire sur le sujet.
Dieu m'a fait éprouver un grand attrait à écrire au sujet
des âmes du Purgatoire. J'ai pu me rendre compte que cela était utile à ces
pauvres âmes, et pousserait ceux qui vivent encore à pratiquer la vertu, à
tendre à la perfection. C'est ce qui m'a fait passer à l'action. Je me suis
décidée à écrire, moyennant que Dieu me donna la vie et m'accorda assez de
force après ma maladie. Cependant, durant quatre semaines environ, j'en ai été
empêchée par le Malin : il se dissimulait sous1es apparences du bien, sans que
je le remarque. Je ne voulais plus réaliser mon projet.
Quand j'y pensais, j'éprouvais une répugnance intérieure et
la chose me paraissait inutile. Pendant ce temps, Dieu m'a visitée de diverses
manières par l'aridité spirituelle et la nuit de l'esprit et je me suis rendu
compte que Dieu voulait me punir comme il l'a fait souvent déjà, quand je ne
voulais pas lui obéir tout de suite. Le jour de la Saint Antoine (17 janvier),
j'ai enfin remporté la victoire sur moi-même et j'ai repris, pour l'honneur du
Nom de Jésus, la décision de glorifier Dieu autant que je le pourrais, en
faisant connaître son infinie Bonté et sa Miséricorde.
Je veux donc écrire du mieux qu'il me sera possible et aussi
véridiquement que j'en serai capable, moyennant que Dieu et le Saint-Esprit
m'en donnent la grâce, et pour autant que je puisse, quand je ne vivrai plus,
aider ainsi les hommes à se préserver des terribles peines du Purgatoire en
menant une vie meilleure, et secourir de la sorte les défunts
. Par obéissance à mon confesseur, le R. P. Candide de Saint
Elisée, religieux carme (mort le 23 novembre 1720), à qui j'ai confié mon âme,
j'écris de mon mieux et en toute vérité devant le Dieu Tout-Puissant, en
présence de qui je me trouve, ce qui s'est passé entre les âmes du Purgatoire
et moi.
Dès ma jeunesse, j'ai éprouvé de l'attrait pour les âmes du
Purgatoire.
Dès l'enfance déjà, je leur manifestais mon amour en récitant pour
elles le rosaire le samedi. Quand j'eus progressé en connaissances et en compréhension,
j'ai offert mes actions comme satisfaction pour les âmes des défunts; je
pensais à elles dans tous mes exercices de piété et durant de longues années,
j'ai fait pour elles diverses pénitences.
Entre autres indications et renseignements que j'ai reçus du
Christ, il y a celui-ci: je dois chaque semaine me proposer de pratiquer telle
vertu devant Dieu et les hommes, m'y appliquer intérieurement et
extérieurement, selon les occasions qui s'offrent à moi, et en appliquer tout
le mérite aux âmes du Purgatoire: celui de l'humilité par exemple, à celles qui
souffrent à cause de leur orgueil et sont retenues en Purgatoire parce qu'elles
n'ont pas assez pratiqué l'humilité, s'estimant beaucoup elles-mêmes et
méprisant les autres. Je devais également faire des actes intérieurs d'humilité
et de mépris de moi-même et envoyer ces bonnes oeuvres au Purgatoire par les
mains de la Mère de Dieu ou de mon ange gardien.
Je devais aussi appeler à mon
aide les âmes du Purgatoire pour qu'elles me fassent avertir par leurs anges
gardiens, au cas où je manquerais à ces vertus, ceci afin de les aider,
d'offrir satisfaction pour elles à la Justice divine, et leur obtenir la
délivrance de ce feu terrible. C'est précisément par l'humilité qu'on peut tant
aider les âmes : bien plus que par d'autres exercices pénibles de pénitence.
Telle est la manière dont le Christ m'a entraînée à la vertu. Il m'a enseigné à
pratiquer tantôt l'une, tantôt l'autre et cela toujours pour les âmes qui ayant
manqué de les pratiquer sur la terre, ont de ce fait à souffrir en Purgatoire.
Ainsi quelques années déjà avant que Dieu daigne me faire la
grâce de communiquer avec les âmes du Purgatoire, je leur ai témoigné mon
affection. J'ai appris beaucoup par cette pratique des vertus, et parce que les
âmes m'avertissaient avec soin, je ne tombais pas facilement dans une faute.
Mais en tout cela, je ne pensais à rien d'autre et je m'imaginais moins encore
délivrer ainsi les âmes du Purgatoire.
« ...Depuis quelques années, je reçois de la part d'âmes du
Purgatoire de nombreux avertissements et cela de diverses manières,
c'est-à-dire dans la mesure où je progresse dans la pratique des vertus.
J'ai
toujours prié Dieu de me préserver de telles manifestations, dans la crainte
que le Malin ne s'y mêle et ne me trompe. Dès que je soupçonnais quelque chose
de ce genre,
j'ai toujours invoqué avec ardeur l'aide de Dieu pour qu'il daigne
ne jamais me conduire par aucune voie difficile à comprendre pour mon directeur
spirituel et qui pût devenir dangereuse pour moi.
Mes relations plus étroites avec les âmes du Purgatoire ont
débuté peu après la mort de mon père. Une demoiselle Marie Pecher me donna à
entendre qu'elle avait grande confiance en moi et désirait me parler.
Mais
comme elle était malade, elle ne pouvait venir chez moi. Je n'avais,
jusqu'alors, entretenu aucune relation amicale avec elle, mais j'appris qu'elle
voulait, auparavant, me rencontrer,
et qu’elle avait été empêchée par sa mère,
dans la crainte que je n’entraîne sa fille à la bigoterie ou à l'état
religieux. Après la mort de sa mère, Marie Pecher continua à se conduire d'une
manière exemplaire et digne d'éloges, en brave jeune fille. Elle était alors
fiancée à un jeune homme du nom de Hufnagel.
Je dus m'excuser, expliquant que je
ne pouvais sortir de la maison avant que les offices religieux pour mon père
eussent été célébrés, mais je lui promis de venir cette semaine-là. Or, ce fut
le jour de la fête de Sainte Catherine, vierge (25 novembre).
Enfin, le jour de la fête de l'Immaculée Conception (8
décembre 1690), voici ce qui m'arriva: j'avais coutume, à toutes les fêtes de
la T. S. Vierge, quand je n'étais pas malade, d'assister à la messe de 4 heures
ou de 4 h. 30 dans notre chapelle de la T. S. Vierge. Toute seule sur le
chemin, munie d'une petite lanterne, je me rendais en hâte à la messe. Au
milieu de la rue appelée « Allée des Carmes »,
je vis devant moi une personne
habillée de blanc.
Elle avait la taille de Marie Pecher.
Je ne pensai à rien,
sans quoi sûrement, j'eusse été saisie de frayeur. Cette forme blanche avança
devant moi tout le long de l'allée dont j'ai parlé, le long des rues et jusqu'à
l'église des Jésuites. Mais là, quand je voulus voir exactement qui c'était, je
ne pus découvrir personne. Ce n'est qu'après, une fois dans la chapelle, qu'il
me vint à l'esprit qui avait marché devant moi et j'en eus la connaissance
intérieure.
Plus tard, Marie se fit apercevoir de nuit également, et m'éveilla
à minuit. Je conçus pour elle une tendre affection et dans ma prière du soir
devant le tableau de la T. S. Vierge, je demandai avec grande confiance: « Si
c'est pour la gloire de Dieu et le salut de cette âme, qu'elle vienne et
qu'elle se fasse connaître, afin que je ne sois pas trompée. »
Or si quelqu'un
me pesait sur le pied avec un doigt brillant comme une aiguille rougie au feu.
C'était aussi douloureux que si ma jambe avait été blessée. Je me levai
aussitôt et me rendis devant mon autel. Là, Dieu me transporta durant trois
heures dans un état tel, que je n'étais pas maîtresse de moi, sans cependant
que j'eusse perdu connaissance. Je devais me tenir vraiment sur mes gardes. Il
me fut clairement montré ce qui manquait à cette âme.
Il me fut montré aussi
qu’elle avait été appelée à l'état de virginité et que le seul motif pour
lequel Seigneur l'avait enlevée si tôt, c'est qu'elle était fiancée. Or, elle
devait mourir vierge.
Jamais je n'aurais pu imaginer que dans l'Au-delà on se
montre si sévère. Non, nul ne saurait le comprendre. Mais j'ai été instruite
par cette âme et j'ai ainsi pu croire, dans la suite, des choses qu'autrement
je n'aurais jamais crues.
Je ne m'étais pas trompée: sa mère, qui vint le lendemain,
m'en donna la confirmation tangible. Elle me brûla beaucoup plus fortement
encore. Je dus également passer trois heures en prières auprès d'elle et noter
ce qui lui manquait.
Il me fut alors manifesté que la maman Pecher, elle aussi,
était morte si tôt uniquement parce qu'elle avait tout mis en oeuvre pour
empêcher sa fille d'embrasser l'état religieux.
C'était pour ce motif également
qu'elle devait beaucoup souffrir en Purgatoire. Cette âme m'a encore indiqué
beaucoup d'autres fautes qu'elle avait commises, en mangeant et en buvant de
bonnes choses sans vouloir se modérer.
Parce qu'elle n'aimait pas faire
l'aumône durant sa vie, elle me dit que son mari, qui vivait encore, il est
mort le 15 juin 1700 - m'enverrait un peu d'argent que je devais partager entre
les pauvres de l'endroit. L'argent me parvint en effet. Cette âme m'a coûté
beaucoup.
Je dus pour elle aussi jeûner au pain et à l'eau. Quatre semaines
plus tard, je voyais encore sur mon pied les marques de ces brûlures, car la
forme de la main et du doigt dont cette âme m'avait touché le pied y
demeuraient encore visibles. Autant j'ai éprouvé de consolation lors de ces
apparitions, autant ces âmes m'ont coûté.
Quand j'eus offert toutes les
satisfactions pour e1les, la mère et la fille vinrent une fois encore dans ma
chambre, le 13 décembre 1690, jour de la fête de Sainte Lucie, vierge et
martyre. Un très beau chant retentit, tiré du psaume: « J'ai été dans la joie
quand on m'a annoncé: nous irons dans la maison du Seigneur ! » Cela, m'a
remplie d'une joie que je ne saurais décrire
Celle que l'on croyait déjà au ciel
La nuit suivante, la mère de mon père s’est annoncée à moi.
C'était justement la fête de S. Jean de la Croix, anniversaire du Jour où elle
était décédée 17 ans auparavant. Je n'aurais jamais cru qu'elle fût encore en
Purgatoire: je la croyais depuis longtemps au ciel. Souvent, surtout le jour
des Trépassés, nous entendions un murmure insolite dans la maison, mais sans
penser qu'il pût provenir d'une âme du Purgatoire. Grâce à Dieu, je ne suis pas
portée à m'imaginer ces choses et j'ai aussi toujours inculqué à mes frères et
soeurs la crainte de telles imaginations.
Mais la manière dont, cette fois-là,
cette âme s'annonça dans ma chambre, fut si bruyante, que mes frères
l'entendirent. Ils vinrent me demander si je n'avais rien entendu, car nos
chambres étaient situées l'une au-dessus de l'autre. Je ne répondis guère,
quoique sachant, de fait, ce que signifiait ce bruit. Elle vint, comme les
autres, à minuit. Je l'entendis gémir en soupirant, comme une personne à la
mort. J'éprouvai aussitôt une grande compassion pour elle, car de son vivant,
je l'avais aimée comme ma mère et j'étais présente au moment de sa mort.
Elle
avait vécu dix-sept ans chez nous, dans la maison. Elle aimait à tel point la
paix, qu'entre ma mère et elle il n'y eut jamais de mésentente, ce que ma mère
appréciait fort. Aussi l'aimait-elle beaucoup. Cette grand'mère menait une vie
pieuse. Elle avait donné le bon exemple jusqu'à sa mort, survenue à l'âge de 80
ans, priant et veillant beaucoup. Tout cela aussi nous faisait espérer qu'elle
ne devait plus être en Purgatoire. Mais, dans sa justice, Dieu l'y a gardée.
Elle me pria de l'aider. Or j'étais au lit et ne pouvais me lever, tant mes
brûlures au pied me faisaient souffrir. Je ne voulais pas me lever non plus en
partie par crainte qu'il m'arrivât de nouveau quelque chose, bien que j'eusse
aimé communier le jour de la Saint Jean de la Croix.
Je décidai donc de rester à la maison pour ne pas m'attirer
d'ennuis, car, outre l'enflure, la chaleur ardente que je ressentais aux pieds
était affreusement douloureuse. C'était presque comme une brûlure à la flamme,
à tel point que ma mère voulut m'envoyer chez un baigneur. Elle était d'avis
que je devais garder le lit. Tandis que j'hésitais ainsi, l'âme de mon père
défunt vint. Elle m'encouragea, me dit que je devais me lever et aider sa mère
à sortir du Purgatoire.
Je n'avais pas à craindre, il fallait seulement avoir
confiance en Dieu et il ne m'arriverait rien. Il m'avait parlé avec beaucoup
d'affection et m'avait rappelé le grand amour du prochain qu'il avait lui-même
pratiqué durant sa vie, se levant parfois la nuit, s'arrachant au sommeil pour
venir en aide à autrui. Puis il me représenta les grandes douleurs des âmes du
Purgatoire et me dit que je ne devais pas trouver de trop d'aider sa mère et de
lui gagner ce jour-là l'indulgence plénière.
Décidée par cette exhortation
pleine d'affection et grave à la fois, je me levai aussitôt, me rendis à l'église
des Carmes et y demeurai de longues heures sans même penser à mes douleurs.
Quand je rentrai ensuite à la maison, il ne m'arriva rien. Son âme me donna
seulement un petit signe de délivrance. L'enflure de pied disparut bientôt et
avec elle la peur qu'il put m'arriver quoi que ce fût de la part des âmes du
Purgatoire.Je tins la chose cachée et n'en parlai même pas à ma mère.
Je n'en
informai que mon confesseur, parce qu'ayant remarqué quelque chose il m'ordonna
de parler, au nom de l'obéissance.Et de même que c'est Dieu qui a commencé
cela, c'est sa Providence qui a tout ordonné et admirablement disposé pour que
j'obtienne une chambre pour moi seule, car ce n'était pas le cas jusqu'alors.
Dans cette chambre, j'ai aménagé un autel. Sous la croix, j'y ai placé mon
tableau de la Très Sainte Vierge, sous lequel j'ai mis celui de l'Ecce Homo
douloureux, en larmes, qui inspire la pitié.
C'est à ce tableau que je vais avec confiance, la nuit
surtout, et je me sentais souvent attirée à venir devant lui, prier pour les
âmes du Purgatoire. Le lendemain de la fête de St Thomas - c'était un vendredi
(22 décembre), j'ai allumé un cierge en l'honneur de la T. S. Vierge et pour le
soulagement des âmes du Purgatoire. Tandis que, selon mon habitude, je faisais
ma méditation sur les souffrances du Christ, je laissai la liberté à mon esprit
et m'occupai avec un zèle tout spécial des âmes du Purgatoire pour les aider
par les mérites des souffrances du Christ. Sans me rien représenter, je
considérais le tableau en priant.
Je remarquai que le Christ commençait à
pleurer tellement, que c'était pitié et que la toile de la sainte image se
gondolait sous l'effet des larmes amères, au point que je craignais de voir le
verre placé devant voler en éclats. Ce spectacle m'emplit d'une frayeur que je
ne saurais décrire. Puis, sans surprise, sans vision, donc pleinement
consciente, je tombai à genoux devant ce tableau, frappée de faiblesse, sans
changer d'état et je l'ai vu des yeux de mon corps.
J'ai vu également ce
phénomène diminuer, puis cesser tout à fait. Bientôt, le Christ recommença à
pleurer plus encore, et d'une manière plus animée. Il pleura à sept reprises.
C'était pitié de le voir. Dans ma douleur, je ne savais que faire et pleurais
moi aussi abondamment, car j'étais fort inquiète de savoir si ce n'était pas
pour moi que le Christ avait pleuré ainsi. Aussi avais-je grand peur. Dieu me
laissa quelques jours dans cette angoisse. Je demandai enfin à Notre Seigneur
ce que signifiaient ces pleurs amers versés à sept reprises. Son amour me
révéla alors que ce qui le faisait pleurer amèrement, c'était sa pitié pour les
hommes, objet de son amour.
Je lui demandai pourquoi il avait pleuré sept fois. Il me
signifia que je devais prier chaque jour pour sept catégories de gens. Puis
tout m'a été dit et le Christ m'a également orientée complètement sur la
manière dont il voulait que je m'applique à lui rendre honneur. Cela devait se
manifester les saints jours de Noël et à la fête du Nouvel-An suivant. Le jour
du Nouvel-An, 1691, je ressentis en mon âme une grande dévotion et de grands
désirs de passer cette année nouvelle dans une grande perfection. J'éprouvai un
ardent désir de prier avec beaucoup d'application pour l'Eglise catholique et
pour tous les hommes.
Dans ma prière intérieure, je me sentis également
entièrement donnée à Dieu, pour qu'il fasse de moi ce qu'il voulait et se serve
de moi pour sa gloire, comme il lui plairait, car je voulais vivre uniquement
pour accomplir sa Sainte Volonté. » Ayant demandé ce qu'elle devait faire cette
année-là, Marie-Anne entendit ces mots: « Je veux que tu souffres sans le
laisser paraître ; que tu vives comme un enfant et que tu aimes comme un
séraphin. » Le Christ, dit-elle, m'indiqua qu'il avait confiance en moi de
préférence à tous les hommes, pour prendre le souci des âmes qui lui ont coûté
tant de souffrances et de sang. Il m'exhorta à un grand amour et à une haute
estime des âmes qu'il a estimées lui-même au point de souffrir et de mourir
pour toutes...
Passage à la vie contemplative
Après cela, raconte la vénérable, j'ai reçu la visite d'un
Carme qui me parut être S. Jean de la Croix. Il me dit que je devais mener une
vie contemplative, puis disparut. Depuis ce temps, j'éprouvai le désir de prier
ainsi et de ne plus continuer à méditer. Je me sentis bien plutôt portée à
prêter attention, comme si quelqu'un me parlait. Les facultés de mon âme se
plièrent très bien à tout cela. Dieu lui-même me guidait avec force vers la
prière contemplative. Je ne pouvais que prêter attention à ce qu'il me disait.
L'attrait de la contemplation était si fort, que je ne pouvais me reposer ni le
jour ni la nuit, si cela ne m'était pas enjoint au nom de l'obéissance. Les
grâces commencèrent à se manifester avec force dans mon âme, que la prière
contemplative améliora rapidement. En même temps, je brillais d'amour de Dieu
et du désir de souffrir pour lui et pour le monde entier: je n'étais presque
plus maîtresse de moi-même. D'abondantes paroles ne me suffiraient pas pour
dire avec quel amour Dieu m'a traitée, alors il m’a fait connaître son amour.
Dans mon émerveillement devant toutes les grâces que Dieu m'a souvent
accordées, je disais parfois au Christ, en versant des larmes: « O, Seigneur,
pourquoi me donnez-Vous de telles grâces, que je n'ai certes pas méritées et
dont je sais que Vous ne les donnez d'ordinaire qu'à ceux qui Vous aiment
vraiment? Je ne vous ai que peu servi jusqu'ici et je vous ai même offensé
beaucoup. Comment est-ce possib1e, Seigneur ? Avez-vous donc déjà complètement
oublié mes fautes ? Je Vous en prie, envoyez-moi la souffrance autant que Vous
le voulez, car cela, je l'ai mérité. » Là-dessus, l'éternelle Vérité m'a donné
et a allumé en mon âme la lumière de la Vérité. Mon âme a été éclairée et son
amour m’a été fait connaître qu'en des paroles telles, que je n'ai pu poser
d'autre question. Mais le Seigneur m'a dit « Ce n'est pas parce que tu le
mérites, que je suis si bon avec toi, mais je te donne la grâce d'être en
relations avec les âmes du Purgatoire, pour t'amener à devenir meilleure et
t'attirer à moi par de tels événements extraordinaires. D'autres sont venus
d'eux-mêmes à moi, avec leur amour pour moi, tandis que toi, tu dois être
attirée à moi et à la vertu par la force de mon amour spécial et de ma grâce. »
= Plus élevées étaient les grâces que Dieu m'avait données, et qu'il a rendues
manifestes aux yeux des hommes, plus aussi il m'a humiliée: plus fortement que
n'aurait pu le faire aucun homme du monde, ce qui m'a coûté souvent bien des
larmes. L 'oeil de Dieu, qui voit tout, regardait au plus profond de mon âme
pleine de fautes et me montrait ce que j'avais mérité. Mais après cela, Il me
faisait connaître sa Miséricorde sans bornes, qui me poussait à l'aime«r
davantage encore.
Vision et description du Purgatoire
C'est en ce temps-là que je fus souvent conduite en
Purgatoire, et j'ai pu voir ce lieu effrayant. Le 15 mai, après la sainte
communion en l'église des Jésuites, cela m'a-t-il été représenté, ou bien y
ai-je été conduite par mon ange gardien ? je ne le sais - j'ai vu devant moi
une grande fosse6 dont je ne pouvais apercevoir l'extrémité, parce qu'elle
était plongée dans l'obscurité complète. Je me rendis néanmoins compte que
cette fosse était occupée, mais je n'arrive pas à en décrire exactement la
forme. Il m'a semblé qu'il y régnait, d'une extrémité à l'autre, un grand
désordre, et une horrible puanteur, comme dans une soue à porcs. Je dus y
demeurer longtemps, bien que cela me donnât un haut-le-coeur, vraiment. Après
quoi j'ai vu un autre endroit, mais tout près de cette fosse, du côté droit.
Cet endroit m'a paru comme un bief de moulin, dont les eaux grossies tombent en
cascade. Mais c'était une cascade de feu qui tombait, de sorte que je
m'étonnais qu'il pût y avoir une eau de feu. Mais quand je suis revenue à moi, j'ai
compris: cette fosse profonde, sans fin, c'est l'enfer; le bief, c'est le
Purgatoire (pré-enfer) où les pauvres âmes sont plongées comme dans une eau de
feu, mais avec une grande différence non selon la peine, car elles sont
immergées dans le feu, mais selon l'ordre et l'amour avec lequel elles
souffrent. Chez les âmes du Purgatoire, j'ai vu clairement qu'elles sont
pleinement unies à la Volonté de Dieu, qu'elles sont extraordinairement
patientes dans leurs souffrances, qu'elles se sentent vraiment heureuses
d'avoir échappé à l'enfer mérité par leurs péchés, au cours de leur vie et de
se trouver dans ce lieu du Purgatoire.
Ce contentement des chers fidèles
défunts au milieu de leurs souffrances, je le souhaiterais bien à moi-même et à
tous les hommes de la terre dans nos souffrances et nos adversités, parce que,
alors, on ne trouverait plus d'impatience ici-bas. Il me fut aussi révélé
qu'aux âmes du Purgatoire, une heure parait plus longue que vingt ans de
grandes souffrances sur la terre. Je compris également que si on leur offrait
de pouvoir sortir du Purgatoire et entrer au ciel quoique non encore
entièrement purifiées, les âmes du Purgatoire aimeraient beaucoup mieux y
rester jusqu'au Jugement dernier que de paraître devant Dieu avec la moindre
tache. J'ai remarqué, chez ces chères âmes qui sont en Purgatoire, une patience
qu'on ne saurait dire, et j'ai appris d'elles à estimer grandement
l'obéissance, en voyant combien, par l'exercice de cette sainte vertu, on peut
les aider et leur rendre autant et aussi vite service. Oh oui, on peut bien tes
appeler saintes, les âmes du Purgatoire, car elles sont pleines d'amour de Dieu
Elles brûlent bien plus de l'amour de voir ce Dieu si bon et
de jouir de sa présence, qu'elles ne brûlent du feu de leurs peines. Une autre
fois, je vis le Purgatoire comme un cachot tout en feu, comme un lieu dont le
feu était effrayant. Tous les feux du monde réunis ne sauraient lui être
comparés, et les pauvres âmes y sont plongées comme des étincelles de feu (Cor.
III, 16 et I Petr. 1,7). « Elles sont si nombreuses que mes yeux n'ont pas
réussi à en embrasser du regard la multitude entière, tant elle est grande. Peu
après, le Purgatoire me fut montré comme un vivier dans lequel se trouvaient
une multitude de poissons. Ces poissons étaient complètement blancs et
tendaient vers moi leur bouche ouverte.
Il m'a été signifié que je devais les
rafraîchir par les larmes de mes yeux et le Sang de Jésus-Christ, en l'offrant
pour elles. Il me fut dit aussi que je devais répandre sur elles du sel, ce que
je ne compris pas tout d'abord, jusqu'à ce que cela me fut expliqué: je devais
accomplir des bonnes oeuvres et les offrir pour les pauvres âmes. Pour donner
une idée du nombre de ces âmes, Dieu me fit voir le Purgatoire sous la forme
d'une fourmilière. Je demandai pourquoi ces âmes m'étaient montrées ainsi. Il
me fut donné à comprendre que c'est parce qu'une fourmilière est couverte,
surtout en hiver où l'on ne remarque absolument pas qu'il s'y trouve un si
grand nombre de fourmis.
Mais si on la remue avec un bâton, ou si on l'enfume, les
fourmis en sortent par milliers. Je devais penser qu'il y a en Purgatoire,
beaucoup, beaucoup d'âmes qui sont cachées à nos yeux, comme dans une
fourmilière couverte, telle que je venais de la voir. Je ne devais donc pas
m'étonner si je voyais qu'elles montrent tant d'ardeur à mon égard. C'est que
par un effet de son amour, sa Bonté était venue maintenant dans cette
fourmilière.
Par ses premières larmes, le Christ avait voulu manifester que si
peu d'hommes pensent aux âmes du Purgatoire d'une manière qui les secoure. Il
se servait de moi comme d'un bout de bâton pour remuer cette fourmilière, pour
que je puisse voir comme y étaient cachées en foule des âmes que l'on croit
déjà au ciel. Puis les âmes du Purgatoire me furent montrées sous la forme d'un
essaim d'abeilles agrippées à un arbre. Il me fut dit que je ne devais pas
m'étonner de leur grand nombre, car rien de souillé n'entre au ciel. Or, les
hommes vivent habituellement comme de vrais mondains, sans penser guère a
l’autre monde, à la vie éternel, et sans reconnaître leurs fautes.
Mais Dieu
examine tout selon la justice. Il me fut dit encore que je devais considérer le
bref temps de souffrances qui, en comparaison de l'éternité, n'est qu'un court
instant, ou encore, considérer quelle récompense infinie était le ciel qui
suivait ce temps de souffrances. Le ciel exige qu'on se fasse violence. Or, la
plupart des hommes, les mondains, ne se font pas violence parce que, en
mondains qu'ils sont, ils ne se croient pas obligés de pratiquer la vertu.
Ainsi, il ne peut évidemment pas en aller autrement: ils demeurent retenus très
longtemps en ce lieu.
Le salut des
non-catholiques
Dieu m'a donné également beaucoup de lumières concernant les
âmes de ceux qui ont vécu et sont morts dans le luthérianisme. Un très grand
nombre d'entre elles ne sont pas réprouvées, mais parviennent à la béatitude
parce qu'elles n'ont pas eu assez de compréhension ou ont été complètement
innocentes. C’est pourquoi Dieu leur a donné, à la fin de leur vie, la grâce de
faire un acte de repentir suffisant pour se sauver et elles ont ainsi quitté ce
monde dans la grâce de Dieu. Il me fut révélé en même temps que ce sont des
âmes qui, durant leur vie ont cru à cette vérité: rien de souillé ne peut
entrer au ciel. Elles m'ont été montrées dans une tout autre prison et elles
tendaient vers moi 1eur bouche ouverte comme des affamées, se plaignant que je
les avais oubliées. Je ne savais pas, tout d'abord quelles étaient ces âmes;
mais quand j’eus prié, il m’a été révélé qu’elles étaient là absolument
démunies de secours. Elles me dirent que je devais et pouvais les aider, car si
elles n'avaient pas vécu dans la véritable Eglise, elles étaient également
privées de tout secours. Elles avaient maintenant recours à moi. Ces âmes
demandaient tout spécialement la messe et la sainte communion. C'est ce qu'indiquait
leur faim. Le Christ me dit, lors de la communion: « Tu as parfaitement raison
de prier pour ces âmes.
Les peines des époux
La vénérable représente comme suit les peines des époux qui,
durant leur vie, n'ont pas pratiqué la chasteté selon leur état: « En 1709, mon
ange gardien m'a conduite en un lieu inconnu de moi. J'y vis un grand lac plein
de soufre et de poix. Je ne voyais rien dans ce lac parce que toute sa surface
bouillonnait comme une eau cuisant à gros bouillons. Quand je revins à moi, je
me mis en prières devant mon Ecce Homo, et demandai au Saint-Esprit et à la T.
S. Vierge de m'éclairer sur le sens de cette vision. Il me fut révélé que ce
lieu était un endroit du Purgatoire et un lieu de peines tout à fait spéciales,
inexprimables, incompréhensibles, pour une catégorie particulière d'âmes ; que
dans ce lac étaient complètement immergés ceux qui, dans le mariage, s'étaient
plongés entièrement dans les plaisirs charnels, menant une vie animale plus
qu'humaine. Je fus également exhortée à témoigner ma pitié toute spéciale à ces
âmes, parce qu'on pense si peu à elles, et à offrir pour elles à Dieu la
douloureuse flagellation de Son Fils unique. Il me fut également révélé à cette
occasion, que Dieu rappelle bientôt à Lui ces gens-là, mais qu'Il reprend aussi
très tôt 1eurs enfants. Le 10 mars 1714, il me fut révélé que dans le saint
état du mariage, on ne vit pas comme on devrait vivre et qu'il s'y commet de
grands péchés. C'est pourquoi Dieu punit sévèrement en ce monde déjà, de la
manière que je viens d'indiquer, mais plus sévèrement encore dans l'autre monde
où beaucoup de gens mariés sont damnés parce qu'ils n'ont pas vécu comme ils
l'auraient dû selon leur état.
La durée des peines du Purgatoire
Le Purgatoire est le lieu que le Psalmiste royal appelle «
Pays de l'oubli » (Ps. LXXXVII, 13) et dont la Vérité éternelle dit elle-même :
« En vérité je te le dis, tu ne sortiras pas de là que tu n'aies payé le
dernier quadrant (menue monnaie) » (Matth. V, 26). A cet endroit de tourments
s'applique en effet la parole du Psalmiste : « Tu as éloigné de moi mon ami et
celui quim'était proche, et mes intimes, tu les as tenus loin de moi » (Ps.
LXXXVII, 19). Pour ce qui concerne la durée des peines du Purgatoire, la
vénérable nous dit: « Les pauvres âmes m'ont montré que dans l'autre monde tout
est calculé avec une exactitude absolue et qu'en cette vie, on peut
diffici1ement s'en faire une idée. Je me suis moi-même souvent étonnée,
autrefois dit-elle, qu’il fut même simplement possible que tant d'âmes se
trouvent en Purgatoire, retenues pour si 1ongtemps, alors qu'on les croyait
depuis bien longtemps dans la joie éternelel. J'ai pu le voir dans le cas de
mes grands-parents, puisque ma grand'mère ne put se présenter chez moi qu'au
bout de dix-sept ans. Le séjour en Purgatoire dure souvent quelques centaines
d'années. Tout cela m'a fait voir combien grande est l'offense faite à Dieu par
le péché et que tout ce qui n’a pas été expié en cette vie doit l'être en
l'autre. Dieu nous a mis en mains les moyens suffisants pour laver notre âme en
ce monde et pour la purifier. Mais ces moyens, comment s'en sert-on ?
Les âmes du Purgatoire m'ont enseigné ce qui est nécessaire
pour faire un bon usage des sacrements, de la prière, des indulgences; que par
la souffrance, les adversités et les maladies, on peut expier beaucoup. Mais
tout se passe souvent sans qu'on y fasse cas.
Dans la suite, je ne me suis plus étonnée de voir dans le
feu du Purgatoire des gens morts depuis cent ans et même davantage, car j'ai
appris à considérer toujours plus quel bien infini est Dieu et quel grand mal
au contraire, est le péché. J'ai appris combien brèves sont les souffrances du
Purgatoire en regard de l'éternité, et que toute peine n'est rien, en
comparaison des peines de l'enfer . Pour ceux qui ont été durs avec leur
prochain, il est difficile d'arriver à la délivrance, car ce qui est dur le
reste.
En 1704, une âme se présenta chez moi. C'était l'âme d'une personne
morte depuis quinze ans. De son vivant, elle passait pour très pieuse. Elle me
dit: « On n'arrive pas si vite au ciel; c'est aussi une souffrance, que les
gens vous tiennent pour des saints, car alors on ne s'applique pas à prier pour
vous. »Ceux qui restent le moins longtemps en Purgatoire sont, selon les
indications de Marie-Anne Josèphe, les débonnaires, ceux qui ont bon coeur, les
miséricordieux et ceux qui meurent en acceptant volontiers la mort. Oh oui! Les
âmes du Purgatoire peuvent être appelées saintes, car elles sont pleines
d'amourpour Dieu et brûlent bien plus du désir de voir la Face de ce Dieu aimé
et d'en jouir, que du feu de leurs peines.
Ce que l'Eglise enseigne au sujet du Purgatoire
Judas Macchabée, nous dit la Bible, envoya à Jérusalem douze
mille drachmes d'argent pour qu'un sacrifice y fût offert pour les soldats tués
dans la bataille parce qu'il pensait que la meilleure récompense était réservée
à ceux qui étaient morts dans des sentiments de piété. C'est donc une sainte et
salutaire pensée de prier pour les morts, pour qu'ils soient délivrés de leurs
péchés (II Mach. XII, 48). La sainte Eglise nous enseigne « qu'il y a un
Purgatoire et que les âmes qui y sont détenues sont aidées par les prières des
fidèles, mais spécialement par l'offrande du sacrifice de la Messe ».
Marie-Anne dit: « Les pauvres âmes du Purgatoire m'ont fait voir que dans
l'autre monde tout est si exactement compté et examiné, qu'on ne peut guère
s'en faire une idée en cette vie, et que dans l'Au-delà, on trouve tout
absolument autrement qu'on ne se l'imagine ici-bas. »
« C'est moi, le Seigneur, qui sonde les reins; moi qui donne
à chacun selon sa conduite, et selon le fruit de ses efforts» (Jer. XVII, 10,
et Apoc. II, 23 ). L'Apôtre lui-même redoutait ce terrible examen, lui qui
pouvait dire: « Je n'ai à vrai dire conscience de rien, mais je ne suis pas
pour autant justifié; car celui qui me juge, c'est le Seigneur, qui mettra au
jour même ce qui est caché, et dévoilera les sentiments du coeur » (I Cor. IV,
4). Le bienheureux Suso tremble à la pensée de cet examen et s'écrie: « Ah! juste
Juge au Jugement sévère! Comme tu pèses les moindres choses, leur donnant un si
grand poids, alors que nul n'y prend garde à cause de leur petitesse! » Les
souffrances des âmes du Purgatoire sont si indicibles, parce que séparées de
leur corps, elles ne peuvent accomplir ni pénitences, ni actions méritoires, ni
oeuvres satisfactoires, parce que, comme dit le P. Faber, elles ne sont plus
sous le régime de la miséricorde du Vicaire du Christ, qui par les indulgences,
distribue les trésors de l'Eglise. La seule consolation et le seul secours
consistent, pour elles, dans la communion des saints, que la mort elle-même ne
peut rompre. Par suite de cet article de foi ces pauvres âmes peuvent parfois,
avec la permission spéciale de Dieu, demander le secours de nos prières et
réveiller leur souvenir dans l'esprit de ceux qui les ont connues de leur
vivant et sont encore sur la terre. Saint Thomas d'Aquin dit expressément que
les âmes du Purgatoire se présentent parfois aux regards des vivants et peuvent
leur apparaître pour leur demander du secours. Dans son « Compendium »,
Caramelli dit à propos de ces apparitions: « Ces âmes, qui appartiennent à
l'Eglise souffrante, apparaissent habituellement aux vivants sous un aspect et
dans une attitude qui excitent la pitié de ceux qui les voient. Souvent,
l'expression de leur visage est triste; elles sont entourées de vives flammes ;
d'autres fois, elles passent devant les yeux de l'âme comme un éclair, comme
une ombre, comme un nuage, mais toujours, la vue de tels signes matériels
éveille en nous le souvenir d'une personne défunte qui nous était chère et nous
nous sentons poussés à prier pour elle. » Quelques mystiques donnent encore
d'autres signes par lesquels s'annoncent les apparitions de ces âmes, qui ne
sont que trop souvent et que trop vite oubliées. Ainsi, par exemple, des
soupirs, des plaintes, des sanglots, toutes sortes de voix ou de sons, des
coups frappés. Dans d'autres cas, on ne perçoit rien extérieurement, mais on
est soudain saisi d'un vague sentiment de tristesse, on ressent une profonde et
mystérieuse poussée c'est comme si l'âme à qui Dieu en accorde la permission,
prenait possession de nous, pour réveiller en nous son souvenir et nous forcer
à prier pour elle.
Comment les âmes du Purgatoire apparaissent
Nous allons voir quels sont les souvenirs de Marie-Anne
concernant les âmes du Purgatoire et comment elles lui apparaissaient. Le P.
Barnabé Kirchhuber, O. S. F., confesseur des clarisses du couvent d'Anger, qui
en 1704 soumit Marie-Anne à une enquête serrée, par mandat du prince-évêque,
écrit le 6 juin en ces termes au premier Évêque concernant les âmes du
Purgatoire : « Depuis le mercredi avant Noël (22 décembre) 1690, les âmes du
Purgatoire sont souvent venues chez Marie-Anne. Elle les voyait la nuit, souvent
durant deux heures, dans les flammes, entendait en même temps de grands soupirs
et gémissements; elle entendait de ses oreilles corporelles le crépitement du
feu. De jour, elle remarque la présence des âmes par des étincelles qui volent
et vont se poser sur son cou, ses mains, et d'autres parties de son corps.
Marie-Anne écrit elle-même à ce propos: « Souvent il y avait dans ma chambre un
grand feu. Dans la suite je ne pus plus le voir des yeux du corps car mon
confesseur me fit défense de regarder autour de moi. J'aurais d'ailleurs été
absolument incapable de le faire, car je me sentais aussitôt poussée à prier.
Je tombais à genoux, entrais en extase et, par la grâce de Dieu, j'y étais si
fixée que je ne pouvais souvent bouger aucun membre ; pas même les yeux. Et
lorsque je voulais me mettre à écrire selon que j'en avais le devoir, les
étincelles tombaient en grande quantité sur ma main et sur mon papier. Les
pauvres âmes voulaient ainsi m'avertir. Dans de nombreux cas, elle souffre de
frissons et de froid quand les âmes s'approchent d'elle; ces pauvres âmes lui
arrivent même grelottant de froid, gelées. A beaucoup d'entre elles il ne lui
était pas permis de demander leur nom et moins encore d'écrire leurs fautes.
Comme le Malin venait se mêler lui aussi sous diverses apparences à ces
événements si mystérieux, soit pour la dérouter soit pour la détourner d'aider
les pauvres âmes, son confesseur lui ordonna, comme le dit dans son rapport le
P. Barnabé Kirchhuber, de prononcer le très saint Nom de Jésus, de montrer la
sainte Croix dans leur direction, de jeter de l'eau bénite ou encore d'allumer
un cierge bénit, quand des âmes s'annonçaient. Si c'était une bonne âme, elle
s'approcherait alors davantage d'elle; si c'était un esprit mauvais, elle
éprouverait intérieurement et extérieurement une inquiétude, mais le mauvais
esprit devrait se retirer
On est puni par où l'on a péché
Dans la suite, les âmes lui apparurent d'une manière
caractéristique correspondant exactement à leur état. Elle écrit: « Dieu m'a
instruite de ce qui manque aux pauvres âmes et comment on peut les aider.
" Certaines âmes sont venues à moi les yeux en pleurs.
Elles m'ont demandé de faire pénitence pour elles en
veillant sur mes regards et en évitant toute curiosité. D'autres me sont
apparues absolument affamées, épuisées, dans un état indescriptible.
Elles me
priaient d'observer pour elles un jeûne sévère au pain et à l'eau et de réparer
ainsi les manquements commis au cours de leur vie par excès dans le boire et le
manger.
D'autres encore m'ont fait comprendre, par leur comportement, leurs
malheureuses colères et leurs impatiences. Elles me priaient de bien vouloir
les aider par des actes de patience et de douceur.
Des âmes qui durant leur vie
n'avaient pas été mortifiées, me tendaient un cilice (instrument de pénitence).
Quand je devais jeûner pour elles, une table abondamment servi m’était montré.
Les âmes qui avaient péché par la langue m'apparaissaient la bouche fermée par
un clou, pour me faire comprendre que je devais garder le silence.
Les âmes
qui, sur la terre, ont été dures de coeur et sans pitié, ne peuvent être aidées
que par des oeuvres de miséricorde et par la générosité.
Ce qui manque à
l'arbre doit être expié sur l'arbre (de la croix). C'est pourquoi aussi tout ce
qui a manqué sur d'autres points doit être expié de la manière dont le
manquement a été commis. Les séducteurs qui se sont convertis à temps, mais
n'ont pas eu le loisir de réparer le mal causé, je les ai vus sous une
apparence semblable à celle de l'esprit malin, parce que c'est le propre du
démon de séduire les hommes pour les entraîner au mal. Les pauvres âmes qui,
durant leur vie, ont trop peu veillé sur leurs regards devaient se montrer avec
des yeux affreusement grands.
Les âmes pleines de suffisance, orgueilleuses de
leur savoir, lui apparaissaient avec des têtes déformées. L'orgueil qu'elles
avaient eu au cours de leur vie, Marie-Anne le reconnaissait à leur visage
cancéreux. Si une âme se montrait du doigt le front, cela signifiait qu'elle
avait été entêté au cours e sa vie.
Un visage qui se détournait d'elle lui
faisait reconnaître la susceptibilité passée, tout comme elle reconnaissait le
manque d'amour du travail à l'aspect pitoyable des mains.
Quand Marie-Anne voyait dans un coin une âme qui priait,
elle savait qu'elle avait manqué à l'obéissance et troublé le bon ordre durant
sa vie.
Ceux qui au cours de leur vie avaient trop aimé les bêtes devaient se
montrer à elle avec l'animal trop choyé autour du cou.
Celles qui avaient été
trop préoccupées des choses terrestres faisant passer les choses de l'éternité
après celles d'ici-bas, elle les reconnaissait à leur taille enfantine.
Quelques exemples notés par Marie-Anne nous le montreront
plus clairement. « Quand il est dans les honneurs, l'homme ne sait pas le
reconnaître, il est semblable à l'animal privé de raison » (Ps. XL VIII, 21 ).
« Le 15 décembre 1690 à minuit, une âme du Purgatoire vint chez moi; je l'avais
fort bien connue de son vivant. C'était un musicien de la cour. Le violoniste
JeanGeorges Loderer (tel était son nom) était le professeur de musique de mon
frère Franz-Philippe et il me donnait à moi aussi des leçons. Il aimait boire.
Il ne m'en voulait en rien quand je le prévenais, souvent, qu'il abrégeait
ainsi sa vie. Il mourut le 7 janvier 1688. J'étais en plein sommeil quand son
âme m'apparut sous la forme d'un gros crapaud, horrible, gonflé, contre le
rideau de mon lit. M'éveillant, je ne fus pas peu effrayée, croyant que c'était
le démon. Et voici que cette âme se fit connaître en pinçant si violemment les
cordes de ma cithare, que je crus qu'elles allaient se rompre. La peur me
quitta alors et je demandai à cette âme pourquoi elle m'apparaissait sous cette
forme. Elle reconnut que c'était pour elle une peine toute particulière de
devoir se montrer sous un tel aspect. C'était parce que durant sa vie, elle
s'était comportée comme cet animal. De même que les crapauds, qui aiment à
séjourner dans les lieux humides, marécageux, recherchent toujours l'humidité,
il aimait, lui aussi, avoir le gosier humide. Cette âme reconnut également,
qu'elle avait ainsi abrégé sa vie et que si maintenant on ne lui portait pas
secours, elle devrait souffrir durant autant d'années qu'elle avait ainsi
abrégésa vie terrestre.
Je me suis donné beaucoup de peine pour cette âme et j'ai
reçu l'indication de sa délivrance.
Une autre âme souffrante, un maçon, qui
avait travaillé souvent dans la maison de mes parents, avait la mauvaise
habitude de blasphémer et de boire.
Il me fut montré enfermé dans un cachot,
derrière une forte grille comme on en met pour garder les bêtes fauves. Il
levait vers moi ses mains en pleurant, me priant, avec d'abondants soupirs, de
lui venir en aide. Il me dit qu'il souffrait abominablement de la langue à
cause de ses blasphèmes. Je devais pour lui, prononcer avec une piété toute
spéciale le Nom Très Saint de Dieu et jeûner même l'eau, souffrir beaucoup pour
lui.
J'ai vu que Dieu l'avait retiré prématurément de ce monde lui aussi
uniquement à cause de sa vie rebutante, et qu'il aurait dût souffrir longtemps
encore s'il n'avait pas eu la grâce de pouvoir m'apparaître. Sa supplication
s'exprimait par ces seuls mot: « Tu peux m'aider, et tu dois m'aider. »
J'étais un jour en prière devant le tableau de
l'Annonciation, dans notre chère chapelle de la T. S. Vierge en l'église de
St.Michel, selon mon habitude. Voici qu'un homme m'apparut comme il était de
son vivant. Triste et pleurant, il tenait en main un verre à vin, me montrant
ainsi en quoi il avait péché durant sa vie. C'était un homme jeune encore. Il
me révéla que si je ne l'aidais pas, il devrait souffrir durant quarante ans
pour avoir abrégé d'autant sa vie en buvant avec excès. Mais parce que de son
vivant, il avait aimé d'un amour d'enfant la T. S. Vierge, et avait été bon
pour les pauvres, la Mère de Dieu m'a elle-même exhortée à l'aider. J'ai jeûné
durant quarante jours au pain et à l'eau et j'ai offert pour cette âme mes
prières, mes confessions, mes communions, les indulgences que je gagnais, et
mes aumônes par les mains de la Mère de Dieu. Au bout de quarante jours cette
âme m’a été montrée dans la béatitude.
« On est puni par où l'on a péché » (Sap. XI, 17).
Aujourd'hui, 10 mars 1714, j'ai vu en Purgatoire, une âme dont le visage - les
yeux surtout -, étaient si horriblement ravagés, qu'il m'est impossible de le
décrire. J'ai appris que cette âme, au cours de sa vie mortelle, aimait à
contempler de mauvaises images et qu'elle avait cependant eu la grande grâce de
mourir dans des sentiments de repentir. Il me fut aussi montré le grand mal que
font ces mauvaises images et ces mauvaises illustrations.
Le 16 septembre 1704
m'apparut la comtesse de Sternberg, dame de la noblesse de Bohême. Elle avait
beaucoup à souffrir à cause de la nudité qu'elle étalait aux regards en portant
des habits décolletés. Comme elle était complètement oubliée des siens, elle
m'apparut, affreusement vieillie. Je l'entendis dire avec tristesse : « Je
n'irai de longtemps pas encore à la maison (au ciel). » Le 8 janvier 1714, une
soeur converse de notre ordre est venue chez moi. Son visage était ravagé comme
par une maladie cancéreuse. Il me fut révélé que cette soeur, au cours de sa
vie, n'était pas peu fière de sa belle prestance.
Une autre âme de notre ordre m'apparut. Son aspect était
aussi minable, que si des oiseaux de proie lui avaient complètement dévoré le
visage. Celle-là aussi dut se montrer ainsi à moi, parce que, de son vivant, elle
avait été orgueilleuse de son beau visage et ne parvenait guère à se dominer.
Le 13 septembre 1703, une âme vint chez moi. Je l'avais fort bien connue de son
vivant. Elle s'approcha et me toucha de sa main au front. Trois jours durant,
j'eus l'impressio qu'on m'avait mis une coiffe très lourde. Je lui demandai ce
qu'elle voulait me faire comprendre par là. Elle m'avoua qu'elle avait été
très incrédule et entêtée au cours de sa vie; qu'elle avait l'habitude de n'en
faire qu'à sa tête. Elle était tombée ainsi dans beaucoup de fautes et dans un
grand désordre.
Le 14 décembre 1712 après les complies, 1'âme d'une soeur
converse m'est apparue sous une forme bien pitoyable. Elle m'a fait connaître
les souffrances qu'elle endurait, aux mains surtout. Ses deux mains étaient
très enflées et semblaient absolument brûlées. Elle m'apprit qu'elle avait de
très belles mains. Aussi travaillait-elle peu, laissant le travail aux autres
soeurs et demeurant très souvent oisive.
Le 20 janvier 1723, une âme m'est
apparue avec des yeux exorbités, horribles à voir. Je sus que durant sa vie,
elle était colérique et envieuse de son prochain et surtout à l’égard des
pauvres. Cette âme avait eu cependant la grande grâce de pouvoir se préparer à
sa dernière heure.
Les âmes qui demeurent le moins longtemps en Purgatoire
Marie-Anne sait, par les expériences faites avec les âmes du
Purgatoire, que ceux qui acceptent de bon gré la mort restent le moins
longtemps en Purgatoire. La comtesse Marie-Anne, Josèphe, Thérèse Preising, née
Rechberg auf Hohenaschau, était très liée avec la vénérable Marie-Anne. Elle
avait eu de fréquentes relations avec elle au cours de sa vie. C'est pourquoi
elle put, après son décès survenu le 17 octobre 1721, venir bientôt chez
Marie-Anne comme le raconte celle-ci : « Le 17 octobre 1721, un vendredi, à
quatre heures du matin, je fus poussée à prier pour la comtesse qui était en
mal d'enfant. A neuf heures de l'avant-midi, elle mourut. Elle se montra à moi
au choeur aussitôt après sa mort, toute joyeuse, car elle avait été pieuse
durant sa vie.
Elle m'apparut telle qu'elle était de son vivant, tenant en main
une pomme qu'elle partagea en deux avec grande envie. J'appris d'elle combien
on manque à son devoir en faisant du jour la nuit et de la nuit le jour. La
comtesse demanda surtout de moi la communion qu'elle avait souvent manquée
durant sa vie. Elle m'avoua que dans le manger, elle ne se privait guère,
estimant que ce n'était pas nécessaire, et qu'elle avait gaspillé inutilement
beaucoup de temps.
Le 18 octobre, toute la communauté offrit pour elle la
sainte communion. Le vendredi 24 octobre, elle entrait dans la béatitude, à
cause du privilège sabatin attaché à la confrérie de Notre-Dame du Carmel, dont
la comtesse portait le scapulaire. Je la vis là-haut, dans une joie
inexprimable, et j'entendis un chant merveilleusement beau. On chantait: «
Vanitas vanitatum » (vanité des vanités). La cause pour laquelle la comtesse
était entrée si tôt dans la béatitude, c'est que, jeune mère, elle s'en était
remise entièrement à la volonté de Dieu et avait demandé elle-même avec un si
ardent désir les sacrements
Le dur traitement des prêtres...
Dieu ne fait pas acception de personnes.
Même des têtes couronnées venaient chercher et trouvaient
secours auprès de Marie-Anne, comme elle nous le raconte. « Le 24 février 1704
je fus poussée intérieurement à offrir mes prières pour l'âme de la grand'mère
de la princesse-électrice. Le 26 février, je fus avertie de prier pour le
prince-électeur Ferdinand-Marie, mort le 26 mai 1679. La même nuit, j'eus la
visite non seulement de la princesse-électrice, mais encore de la princesse
électrice Adélaïde décédée le 18 mars 1676 et de sa fille Marte-Anne-Christine,
décédée le 20 avril 1690, comme épouse du roi de France Louis XV. J'ai enduré
ce jour-là de dures souffrances. Le 22 février, au moment de la communion, j'ai
éprouvé l'espoir qu'elle serait bientôt délivrée, et je la vis aussi souffrir
moins.
Le 29 février, après avoir passé trois heures à prier et
surtout à faire des actes d'amour pour ces pauvres âmes, je vis, peu après
quatre heures du matin, les âmes du prince-électeur, de son épouse et de leur
fille ainsi que l'âme de la grand'mère de la princesse-électrice, entrer toutes
quatre glorieuses au ciel. Bientôt après, d'autres imes se sont annoncées et
j'ai dût prier tout spécialement pour les familles des souverains d'Autriche et
d'Espagne. » Le 17 juin 1696, mourut Jean III Sobieski, roi de Pologne, âgé de
72 ans. Marie-Anne écrit à ce propos en 1703 : « Quelques mois déjà avant que
j'aie eu une révélation au sujet du roi de Pologne, une âme s'est annoncée avec
bruit chez moi et j'en ai été très angoissée durant la nuit. Le jour de la fête
de notre Fondatrice S. Thérèse, le 15 octobre, je fus éveillée soudain à minuit
et je dus me mettre en hâte à prier. Je priai surtout pour son Excellence la
princesse-électrice Thérèse-Cunégonde, fille du roi Jean III Sobieski, parce
que c'était le jour de sa fête. Pendant que je priais, il me vint l'idée de
prier aussi pour tous les défunts de la famille du prince-électeur, sans penser
à aucun en particulier. Dans l'octave de la fête de S. Thérèse, je vis cette
âme qui s'était annoncée souvent déjà comme grand seigneur, mais qui ne parlait
pas. De jour également je le voyais à mon côté droit. Quand je me fus bien
aperçue de sa présence, il disparut sans me rien manifester d'autre. Le 4
novembre dans l'octave des Trépassés, c’était aussi le premier dimanche je fus
ravie en extase et conduite dans une grande salle magnifique où était dressé un
catafalque
Quand je revins à moi, je me sentis, quoique très
faiblement, entraînée à prier et à offrir la communion pour ces hautes
personnalités défuntes. Le 6 novembre, à minuit, je fus de nouveau réveillée
précipitamment et j'entendis ces paroles: « Prie pour le père de la
princesse-électrice. » Je le fis. Durant cette prière, cette âme me fut
manifestée et je reconnus toutes ses fautes et ses manquements. Après quoi,
j'offris tout à Dieu pour elle, mais en particulier le précieux Sang du Christ.
Du 6 au 11 novembre, je m'appliquai à gagner le plus possible d'indulgences
pour cette âme, et l'espoir me fut donné pour elle. Le 11 novembre, fête de S.
Martin, me fut montré en vision un délicieux banquet. Il me fut fait connaître
ainsi que cette âme allait bientôt être admise au banquet céleste. Durant la
sainte messe, je vis des yeux de mon corps cette âme brillant d'un très vif
éclat, monter au ciel et au même instant toute angoisse s'envola pour ainsi
dire. »
Il est surprenant que dans les écrits de Marie-Anne il ne se
trouve rien concernant le pieux empereur Léopold I, sinon la révélation de sa
mort, qu'elle reçut en mars 1705 et dont elle parle en ces termes: « Le 10 mars
il me fut montré une grande paroi avec ses fenêtres, violemment arrachée; 1l me
fut annonce qu’un potentat mourrait et aussi que Dieu serait miséricordieux
pour son âme. L'âme de ce prince selon le coeur de Dieu n'avait plus besoin de
son secours dans l'Au-delà, car il avait, en ce monde, enduré un fameux
Purgatoire de la part des Turcs. Mais Marie-Anne a écrit concernant l'empereur
Joseph I, fils et successeur de Léopold I sur le trône, qui mourut le 17 avril
1711 de la petite vérole. La vénérable eut, durant sa prière, la révélation de
la maladie de l'empereur. » Après la communion, le 15 avril, je priai le
Seigneur pour l'empereur et lui demandai s'il devait déjà mourir. Il me fut
dit: « Oui, et il est bon pour son âme qu'il meure. » Quand arriva la nouvelle
de sa mort, j'en fus très effrayée et Dieu inspira à mon âme un amour spécial
pour la sienne: de faire beaucoup de bien pour elle et de jeûner quarante jours
au pain et à l'eau. Je sentais souvent cette âme pendant la prière. Au terme de
ce jeûne, l'âme revint plus souvent encore.
Ce matin 26 janvier étant réveillé mais non encore levée, je
la vis en long habit noir . Très amicalement e t avec grande douceur, elle
m'appela : « Mademoiselle Marie-Anne ! » Je ne pouvais pas encore la
reconnaître et je la recommandai à Dieu. J'en étais à me demander si c'était
une personne consacrée ou un laïque, quand voici qu'elle m'aborde: « Ne me
connais-tu donc pas ? moi qui viens tous les jours chez toi ? Je suis
l'empereur Joseph. » Je fis dès lors pour lui ce que je pus. Le 29 janvier
1712, je le vis un oeil ouvert et l'autre fermé. Il me fut révélé que c'était
parce que, de son vivant, il avait eu trop peu le souci de l'Eglise de Dieu. Le
9 février, son âme m'apparut toute blanche et le 14 février, je le vis monter
au ciel joyeux et magnifique. » Voilà donc quelques faits choisis parmi les
apparitions d'âmes du Purgatoire à Marie-Anne. Ils justifient déjà suffisamment
ces paroles de la servante de Dieu: Nul ne croira ce que m’ont coûté les âmes
du Purgatoire. Mais j'ai fait l'expérience que les personnes haut placées m'ont
beaucoup plus tourmentée que d'autres de condition plus modeste. »
À Quoi savent de nous les âmes du Purgatoire ?
Les âmes du Purgatoire sont au courant de ce qui nous
concerne. Nous le savons par cette note de MarieAnne: « Une consoeur a
recommandé une âme à mes prières et exprimé le désir que je prie Dieu pour que
cette âme puisse venir chez elle. Dans mes prières, j'ai recommandé ardemment
cette intention à Dieu, si telle était sa sainte volonté. La même nuit, cette
consoeur a vu le Christ qui l'a prise par la main et s'est montré très aimable
et tendre à son égard. Quand je l'ai appris, j'ai prié Dieu de me manifester
pourquoi cela était arrivé et pourquoi ce n'était pas l'âme qui s'était
montrée.
Il me fut révélé que Jésus avait agréé l'amour que cette
consoeur avait manifesté pour cette âme comme si elle le lui avait manifesté à
Lui-même. C'est pourquoi il était venu lui-même remercier, pour avertir qu'on
doit penser beaucoup aux âmes du Purgatoire. Les âmes elles-même sont aussi
reconnaissantes à l’égard de leurs bienfaiteurs. Là-dessus, cette même soeur me
demanda, au cas où cette âme viendrait de nouveau chez moi, de lui demander de
prier pour sa fille, pour qu'elle choisisse une bonne carrière. Quand je
communiquai cette demande à l'âme du Purgatoire, elle me répondit: « Il serait plus
salutaire pour celle qui fait cette demande, de se recommander elle-même pour
qu'on intercède afin qu'elle apprenne à mieux accomplir son devoir d'état et à
être plus obéissante à ses supérieurs.
Pour conclure, écoutons encore ce que répond Marie-Anne à la
question: si en Purgatoire les imes peuvent déjà nous exaucer.
Voici ce qu'elle écrit à ce sujet : « Dieu exauce rapidement
ceux qui ont confiance aux ames du Purgatoire, les invoquent, les prient. »
Le
motif en est clair: c'est que ces âmes sont en état de grâce ; elles sont donc
agréables à Dieu et rien n'empêche qu'elles prient pour nous; que Dieu leur
dévoile nos besoins et nos demandes et nous accorde quelque chose par leur
intercession.
« Il m'a été fait connaître dit encore Marie-Anne que cet
exaucement rapide ne provient pas des âmes, comme si c'étaient elles qui
exaucent, mais que Dieu exauce, eu égard à l'amour qu'Il a pour elles. Elles ne
peuvent pas nous aider elles-mêmes, aussi longtemps qu'elles ne voient pas la
Face de Dieu.
Mais Dieu nous exauce cependant à cause des âmes du
Purgatoire, parce qu'Il les aime et désire les avoir avec lui comme des amis
très chers. Il récompense avec générosité l'amour qu'on leur témoigne et nous
aide en suivant cette voie à parvenir de la manière la plus rapide à la vertu
et à la perfection" " Faites-vous donc des amis qui vous prendront
ensuite dans les demeures éternelles " (Luc XVI, 9) et travaillez, pendant
qu'il est jour, car la nuit vient, où personne ne peut plus travailler (Joh.
IX, 4). Comme l'écrit la vénérable: « J'ai reconnu qu'un sou en cette vie vaut
plus que mille florins après la mort, parce l’homme peut encore acquérir des
mérites. " Saint Césaire, archevêque d'Arles, décédé le 27 août 542, écrit
ceci: Quelqu'un pourrait dire: « Que m'importe, le Purgatoire si longtemps
qu'il dure, pourvu que j'arrive finalement à la vie éternelle! Que nul, mes
chers frères, ne tienne ce langage, car ce feu purificateur sera plus terrible
que tout ce qu'on peut imaginer, voir ou subir en ce monde en fait de
tourments. »
Dures épreuves et interdictions
Dures épreuves et
interdiction Voici maintenant quelles épreuves eut à subir Marie-Anne, du fait
de son amour miséricordieux. « Le grand feu du Purgatoire que Dieu m'a fait
voir, écrit-elle, m'a éclairée de telle sorte que j'ai acquis une profonde
connaissance de Dieu. Il me semblait que je n'étais plus dans le monde: toute
la lumière du monde ne me paraissait que ténèbres. Je ne pouvais plus guère
m'entretenir ni avoir de relations avec personne, car mon zèle m'entraînait
bien vite et me forçait à parler de choses surnaturelles, sans que je puisse me
contenir. Les âmes du Purgatoire se faisaient tellement entendre dans notre
maison, que mes frères et soeurs et les domestiques s'en apercevaient. Cela
donnait malheureusement lieu à de nombreuses conversations et parvint à la
connaissance du public. Les ecclésiastiques spécialement, interprétaient cela
en mal pour moi et les jésuites eux-mêmes éprouvaient un grand déplaisir des
choses que les âmes me révélaient. Quant à moi, je n'en pouvais mais, car telle
ou telle âme avait besoin de quelque chose que je devais révéler, et je ne
faisais rien que par obéissance spirituelle.
On m'accusait d'avoir révélé cela de mon propre chef; on
disait que mon confesseur (P . Bilbis, S. J.), avait trop agi selon mon avis.
J'aurais besoin disait-on, d'un bon confesseur sévère, qui me tint dans
l'obéissance stricte et l'on souhaitait que je quitte le P. Bilbis. J'ai eu, il
est vrai, en mon confesseur, un père vraiment trop doux pour mon âme
imparfaite, mais il exigeait cependant une obéissance si ponctuelle, que je
l'ai craint plus que tous mes confesseurs précédents. Quand je remarquais qu'il
tenait bon et ne me cédait pas, je me soumettais entièrement. Cela m'a été très
salutaire; aujourd'hui encore, je remercie Dieu d'avoir ainsi disposé les
choses. Je reconnais maintenant comme je l'ai reconnu alors déjà, qu'aucun
guide ne m'a été plus utile et plus nécessaire que lui.
Toujours, ma prière
demandait à Dieu de daigner tout ordonner, si son Eglise devait en éprouver
quelque dommage, pour que cela fût reconnu et cessât. Ma manière de faire
n'aurait causé aucun tort à qui que ce tût, mais les contre-vérités et tous les
commerages que les gens avaient répandus en mon nom concernant les âmes du
Purgatoire causaient du tort. Il ne manquait pas de gens qui, pour gagner de
l'argent, couraient les maisons disant: « Telle et telle âme est délivrée » et
se donnaient l'air d'avoir été envoyées par moi. Pour ce motif et pour bien
d'autres choses que Dieu a permises pour m’humilier et me purifié de mes péchés
j’ai été l’objet de soupçons horribles et l'on a répandu sur mon compte des
propos infamants. Ce sont précisément ceux qui avaient répandu ces bruits qui
ont ensuite cherché par tous les moyens à me faire soupçonner, probablement
parce qu'ils se sont vus démasqués. On me tenait pour une sorcière disant que
ce que l'on pourrait faire de mieux serait de me brûler sur un bûcher; on me
tenait aussi pour une fourbe. Mais je ne faisais aucun cas de tout cela et du
moment que ma conscience ne me reprochait rien, même les calomnies n'ont pu
m'attrister; j'avais pitié uniquement à cause des âmes du Purgatoire. Pour
mettre fin à ces médisances, Dieu a ordonné dans sa Sagesse, que tout me fût
interdit. »
Le jour de la fête des princes des ap8tres S. S. Pierre et
Pau1 1691, communication de cette défense lui fut donnée officiellement par le
doyen de Notre-Dame, M. Von Constante, au nom de l'obéissance. Le texte
mentionnait expressément qu'elle ne devait plus se lever la nuit pour les âmes
du Purgatoire. En tout et pour tout, écrit-elle j'ai obéi, je m'en suis tenue à
cela et l'ai fait volontiers. J'aurais mieux aimé perdre la vie que de devenir
désobéissante. Mais ma santé commença à s'altérer, et je n'eus plus ma bonne
mine; je sentais aussi mes forces diminuer et souffrais de telles faiblesses
dans la tête, que je ne pouvais plus ni dormir, ni veiller vraiment. Cela me
faisait beaucoup souffrir intérieurement. Mon père spirituel me consola en me
rappelant que c'était par obéissance que je le faisais. Quoique j'aie couru
bien des dangers de mort à cause de l'obéissance, j'ai vu pourtant que
l'obéissance est d'une force et d'une puissance extraordinaires.
Comme j'ai pu le remarquer plus tard, cette obéissance n'a
nui en rien aux âmes du Purgatoire: elle leur a porté secours. Moi aussi, cette
année-là et jusque au cours de la troisième année (c'est le temps que semble
avoir duré cette défense), j'ai beaucoup avancé au point de vue spirituel, en
fait de pureté de conscience, de prière intérieure et d'obéissance et même dans
toutes les vertus. Jamais, jusqu'alors, je n'avais pu prier comme je l'ai pu en
ce temps-là où je suis restée presque sans distractions, ce que j'ai considéré
comme une grâce spéciale. C'était pour moi comme si, du ciel, il pleuvait des
grâces. » Les âmes du Purgatoire n'osant plus la réveiller, car elles s'en sont
tenues elles aussi à l'obéissance, c'est son saint ange qui pourvoyait à cet
office. « D'une voix claire et aimable, mon bon ange gardien me réveillait à
une heure matinale, en m'appelant par mon nom. » Dieu a en tout ses vues très
saintes et ne permet rien sans motif plus grave. Aussi voulut-il conduire
Marie-Anne de l'extérieur à son intérieur et la diriger: « Je veux conduire
l'âme dans la solitude; là je parlerai à son coeur» (Osée II, 16). Tel était le
dessein de Dieu pour la rapprocher de son but. « Après cette épreuve
(l'interdiction), je suis venue dans la solitude où Dieu a parlé à mon coeur et
où je me sentais plus attirée encore qu'auparavant à une vie plus austère.
Marie-Anne Lindmayr devient carmélite
Il me venait souvent à l'idée de mener dans le monde la vie
d'une carmélite, car quand je pensais au grand bonheur de ma soeur M.
Jeanne-Thérèse de S. Wenceslas, qui était carmélite à Prague, j'étais remplie
de tristesse et j'éprouvais en mon coeur une vive douleur de n'avoir pas reçu
de Dieu cette grâce. Mais j'en mettais la faute sur mes péchés et mon
indignité, car je me trouvais indigne d'habiter fût-ce le pire recoin du monde.
Bien sûr, j'étais contente de Dieu, mais que de larmes j'ai versées à cause de
la vie du cloître ! J'aurais parcouru le monde entier par monts et par vaux
pour avoir ce bonheur. Mais Dieu ne l'a pas voulu. Le jour de la fête de notre
bienheureux Père S. Joseph, je voulus faire mes exercices de piété dans
l'église des carmélites. Il me vint soudain cette pensée, après la communion: «
Pourquoi ne pas m'appliquer à imiter ma soeur M. Jeanne-Thérèse et ne pas
entrer dans le saint ordre ?
On peut devenir carmélite dans le monde également, si l'on
veut: nul besoin d'entrer au cloître pour cela. » Cette pensée et l'ardent
désir de la réaliser, ne quittèrent plus mon esprit. Quand j'en parlai à mon
confesseur, il en fut content et reconnut que cet attrait venait de Dieu. Je me
suis dirigée d'après son conseil et j'ai cherché avec confiance ailleurs ce que
je ne pouvais pas trouver ici. Sur mon humble demande écrite, le P. Franz
Ernest, alors prieur de Regensbourg, m'a acceptée et admise. Le jour de la fête
du S. Scapulaire, le 16 juillet 1687, à cinq heures, j'ai revêtu le grand
scapulaire, à l'heure même où le prieur formulait son intention de m'admettre
ainsi en esprit dans l'ordre du Carmel.C'est sous le P. Franz Ernest également
que je fis mon année de noviciat, vivant fidèlement selon ses prescriptions,
pour ce qui concernait le saint ordre. Quant aux exercices, c'est mon
confesseur, le P. Bilbis qui me dirigeait. En 1691, le 8 août, les carmélites
tinrent chapitre.A ce moment, je suppliai Dieu dans une prière ardente, de
daigner ordonner, pour le bien de mon âme, que mon père spirituel, le Père
Candide de S. Elisée, devienne prieur. Les âmes du Purgatoire m'ont aidée à
prier pour ce père spirituel dont j'avais grand besoin et que Dieu - je le
savais - avait choisi pour mon âme de toute éternité. »
Le P . Candide fut en effet nommé prieur du couvent des
carmélites de Munich. Avec la connaissance et l'assentiment du P. Bilbis, S. J
., il entreprit de guider Marie-Anne au point de vue spirituel, sans être à ce
moment son confesseur. « Le P. Candide m'exhorta à demeurer cachée et non
seulement il tint fermement à ce que cette consigne soit observée en tout, mais
il me soumit enoutre à diverses épreuves. Au début, la Malin me suggéra des
pensées hostiles à lui, de telle sorte que bien des choses me pesaient beaucoup
venant de lui. » « Comme le P. Candide exprimait très franchement sa manière de
voir, je croyais qu'il ne me connaissait pas suffisamment et ne savait pas que
j'avais tout fait parce que Dieu le voulait ainsi de moi. Je pensais : mon père
spirituel ne me connait pas vraiment, sinon il n'userait pas de telles paroles,
car il n'y arien en mon coeur qui ne soit pour la gloire de Dieu et le salut du
prochain. Ce n'était pas une petite croix pour moi, et cela me causait souvent
du trouble. Ses paroles étaient conformes à la saine raison et fort bien
pensées, selon l'enseignement de l'Eglise, mais malgré cela, je craignais de ne
pas être guidée par lui selon la volonté de Dieu. Je dus maintes fois me
vaincre moi-même, pour lui avouer enfin qu'il ne parlait pas selon mon sens. A
quoi il répondit qu'il me fallait prendre ce qu'il y avait de bon et y ajouter
quelque chose de meilleur et de plus parfait pour que Dieu puisse agir dans mon
coeur .
Je reconnus alors combien je tenais encore à mon propre
jugement, combien jusqu'alors je m'étais peu exercée à l'obéissance, puisqu'il
m'en coûtait tant de me plier. Je croyais être parvenue déjà à un haut degré
d'obéissance alors que je n'arrivais de loin pas encore à soumettre mon
jugement. J'ai la conviction que Dieu a envoyé le P. Candide tout exprès pour
conduire mon âme à Lui. » En 1691, le soir de la fête de notre Mère Sainte
Thérèse, avec la permission du Père provincial et du P. Lucas de S. Gérard, j'ai
été effectivement reçue dans le saint ordre du Carmel et revêtue du saint habit
dans ma chambre, par mon père spirituelle P. Candide, et à la grande joie du P.
Bilbis mon confesseur. J'ai choisi la règle primitive de stricte observance
pour la grande consolation et le profit de mon âme et me suis engagée à
observer la règle de l'ordre autant qu'on peut le faire dans le monde; à
m'abstenir pour toujours de viande et à pratiquer les exercices de pénitence et
les prières prescrites. Voici quelle est pour moi la règle à suivre dans l'état
laïc:
1. Tant que je suis en bonne santé, c'est pour moi un devoir
de m'abstenir de viande
2. Chaque jour, je dois réciter 80 Pater et Ave et si j'en
ai le temps, consacrer chaque nuit deux heures à l'oraison mentale.
3. Me lever à 5 heures.
4. Me donner la discipline 4 fois par semaine et porter 3
fois le cilice.
5. Mon lit ne doit consister qu'en un sac de paille et une
couverture.
6. Je dois, autant que le permettent les circonstances,
observer le silence.
Telles sont mes obligations. Il ne m'est pas défendu d'en
faire davantage, mais je dois en demander la permission. Ce n'est qu'ensuite,
que je devais apprendre à pratiquer l'obéissance, et à vivre selon la vertu. Je
pouvais continuer mes privations et jeûner trois fois par semaine au pain et à
l'eau. Un an après, le soir de la fête de notre Mère Sainte Thérèse exactement,
j'ai fait ma profession religieuse devant le P. Candide, prieur, qui m'a donné
à cette occasion les noms de Marie-Anne, Josèphe de Jésus. La profession
religieuse m'a comblée de bonheur et ce saint ordre a été ma plus grande joie.
Chaque fois que j'y pensais, je me réjouissais d'être devenue religieuse de ce
saint ordre et me sentais encouragée à faire preuve d'un zèle continuel pour
tendre à la perfection et observer fidèlement la sainte règle. Une voix
intérieure me disait que je ne devais plus me demander à l'avenir si quelque
chose était péché ou mal, mais si cela était parfait et saint.Si quelque chose
n'était pas parfait, je devais m'en abstenir, sous peine de ne point parvenir à
la perfection. Je dois veiller tout spécialement sur mes paroles et placer une
sentinelle devant ma bouche, pour ne pas pécher par la langue, car celui-là est
parfait, qui ne pèche pas par la langue » (Jesus Sirach XIV, 1 ).
Dans la suite, Marie-Anne malade et alitée, enleva durant
cinq semaines son grand scapulaire. Elle fut invité à le remettre et a le
porter continuellement. « Une jeune fille d'une beauté extraordinaire m'apparut
et m'invita à remettre le scapulaire que je portais en lieu de saint habit. »
En 1699, dans la nuit qui précéda l'Epiphanie, Marie-Anne renouvela ses voeux.
Voici ce qu'elle nous dit à ce sujet: « En guise d'or je me suis proposé de
m'exercer à la charité, en faisant des actes d'amour; en guise d'encens, je me
suis proposé d'offrir à Dieu la plus belle vertu: l'humilité, comme un encens
d'agréable odeur, et en guise de myrrhe, de ne rien demander à Dieu sinon la
souffrance. » Marie-Anne participait avec la plus grande ardeur à tout ce qui
concernait l'ordre des Carmes. Le partage de la province qui eut lieu en mai
1701 et divisa l'ancienne province en deux: une province d'Autriche et une de
Bavière, fit beaucoup souffrir son coeur et l'émut profondément. C'est
probablement cet événement qui fut cause des longs voyages) fort pénibles à
l'époque, que fit la vénérable à Prague et à Graz. Le P. Théodore, qui fut
ensuite prieur à Vienne et qui s'opposa avec la plus grande vigueur à cette
division, semble lui avoir causé de ce fait bien des douleurs.
Apendice
S. O. S. (Save Our Souls, sauvez nos âmes!) C'est l'appel de
détresse. S. O. S., tel est aussi l'appel que nous adressent les âmes du
Purgatoire : sauvez nos âmes ! " La rouille du péché est la gangue de
l'âme. Elle en est éliminée par le feu du Purgatoire. Plus cette gangue se
détache d'elle, plus la lumière du vrai soleil - Dieu - y pénètre. La joie
augmente donc dans la mesure même où l'âme s'ouvre aux rayons divins. Ainsi
l'une croît et l'autre décroît jusqu'à ce que le délai soit échu. Ce n'est pas
la peine qui diminue, mais le temps qui reste à la subir.» Sainte Catherine de
Gênes (1447-1510)
CE QUE LE CATÉCHISME ROMAIN NOUS DIT DU PURGATOIRE ET DE
L'ENFER
Ces lieux (les enfers) ne sont pas tous de la même espèce.
Il existe en effet une prison horrible, ténébreuse, où les damnés sont
tourmentés avec les esprits immondes, par un feu perpétuel et inextinguible. On
appelle ce lieu géhenne, abîme et enfer proprement dit (Act. 2, 24; Mat th. 10,
28; Luc 16, 22; Apoc. 9,11). Il existe en outre un feu purificateur, où les
âmes des justes se purifient dans des souffrances d'une durée déterminée, en
attendant que puisse s'ouvrir pour elles l'entrée de l'éternelle patrie où rien
de souillé ne saurait y pénétrer.
Le curé veillera donc avec d'autant plus de soin à prêcher
cette vérité basée, comme le déclarent les saints Conciles, sur le témoignage
de l'Ecriture Sainte et de la Tradition apostolique, vu que nous sommes
parvenus à une époque où les hommes ne supportent plus la saine doctrine. Un
troisième, enfin c'est celui où étaient reçues les âmes des saints morts avant
la venue de Notre Seigneur Jésus-Christ et où elles jouissaient d'un séjour
tranquille, à l'abri de toute souffrance et soutenues par l'heureuse espérance
de la rédemption. Or ces âmes qui attendaient le Sauveur dans le sein
d'Abraham, le Christ Notre Seigneur les a délivrées en descendant aux enfers.
L'âme du Christ est descendue aux enfers. Non pas seulement
par sa puissance, mais réellement
N’allons pas nous imaginer cependant qu’Il soit descendu aux
enfers en ce sens que sa force et sa puissance y soient allées, et non son âme;
ce qu’il faut absolument croire, c’est que son âme elle-même est descendue aux
enfers, réellement et en substance, comme le prouve ce témoignage, si formel de
David : « Tu ne laisseras pas mon âme aux enfers « (Ps. 15, 10).
La dignité du Christ n'a subi aucune atteinte du fait de la
descente aux enfers.
Mais quoique le Christ soit descendu aux enfers, sa
toute-puissance n'en a subi aucune atteinte; l'éclat de sa sainteté n'en a pas
été terni par la moindre tache. Au contraire, ce fait a prouvé de la manière la
plus claire que tout ce que l'on avait dit de sa sainteté était parfaitement
vrai et qu'il était le Fils de Dieu, comme il l'avait prouvé auparavant par
tant de miracles. Nous le comprendrons aisément, si nous comparons entre eux
les différents motifs pour lesquels le Christ et les autres hommes sont venus
en ce lieu. Car tous les autres y étaient descendus en captifs, mais lui libre
et vainqueur parmi les morts (Ps. 87, 6), et en vainqueur, pour terrasser les
démons qui tenaient ces âmes enfermées et enchaînées à cause de leurs fautes.
D'ailleurs, de tous les autres, qui étaient en ces lieux, une partie enduraient
les châtiments les plus douloureux, mais les autres, sans cependant éprouver de
douleurs, étaient privés de la vision de Dieu, et réduits à espérer la vie
bienheureuse qu'ils attendaient, et étaient punis ainsi. Mais Notre Seigneur
Jésus-Christ descendit aux enfers non point pour souffrir en quoi que ce fût,
mais bien plutôt pour délivrer les saints et les justes du poids lamentable de
cette captivité et leur appliquer les fruits de sa Passion. S'il est descendu
aux enfers, c'est sans rien perdre de sa souveraine dignité et de sa puissance.
N'allons pas nous imaginer cependant qu'Il soit descendu aux
enfers en ce sens que sa force et sa puissance y soient allées, et non son âme
; ce qu'il faut absolument croire, c'est que son âme elle-même est descendue
Quelles sont les raisons qui ont porté le Christ à descendre
aux enfers
Ce qu'il faudra ensuite expliquer, c'est que Notre Seigneur
Jésus-Christ est descendu aux enfers non seulement pour arracher aux démons
leurs dépouilles et pour délivrer de leur prison les saints patriarches et les
autres justes, mais encore pour les introduire avec lui au ciel. C'est ce qu'il
a accompli d'une manière admirable et infiniment glorieuse. Car sa présence
répandit aussitôt sur ces captifs la plus brillante lumière et remplit leurs
âmes de délices et d'une allégresse infinies; et il les mit en possession de
cette béatitude si désirée, qui consiste dans la vision de Dieu, ce qui réalisa
la promesse qu'il avait faite au bon larron en lui disant: « Aujourd'hui même
tu seras avec moi en paradis» (Luc 23, 43).
Cette délivrance des bons, Osée l'avait du reste depuis
longtemps prédite en ces termes: « O mort, je serai ta mort! Ô enfer, je serai
ta désolation » (Os. 13, 14). C'est à cela encore que faisait allusion le
prophète Zacharie quand il disait: « Toi aussi par le sang de ton alliance tu
as délivré tes captifs de la fosse sans eau » (Zach. 9,11). C'est enfin ce qu'a
exprimé l'Apôtre par ces paroles : « Il a dépouillé les principautés et les
puissances et les a livrées hardiment en spectacle en triomphant d'elles par la
croix » (Col. 11,15). Mais, pour mieux comprendre encore la portée de ce
mystère, il faut souvent rappeler à notre mémoire que ce ne sont pas seulement
les bons qui ont vu le jour après la venue du Seigneur, mais aussi ceux qui
l'ont précédé depuis Adam et ceux qui vivront jusqu'à la fin des siècles, qui
ont dû leur salut au bienfait de sa Passion. C'est pourquoi, avant sa mort et
sa résurrection les portes du ciel ne s'étaient jamais ouvertes pour personne.
Les âmes des justes en quittant ce monde, étaient transportées dans le sein
d'Abraham, ou bien, comme c'est le cas à présent encore pour celles qui ont
quelque tache à laver et quelque dette à payer, elles étaient purifiées par le
feu du Purgatoire. Il y a encore un autre motif pour lequel le Christ est
descendu aux enfers: c'est pour y manifester aussi sa puissance et son empire
aussi bien qu'au ciel et sur la terre surtout « pour qu'à son Nom tout genou
fléchisse au ciel, sur la terre et dans les enfers » (Phil. 2, 10). Qui
n'admirerait ici l'immense bonté de Dieu à l'égard du genre humain ? qui ne
s'étonnerait, de le voir non seulement accepter pour nous la mort la plus
cruelle, mais encore pénétrer dans les profondeurs les plus ténébreuses de la
terre pour arracherles ~mes qui lui sont si chères et les conduire à la
béatitude ?
CE QUE NOUS ENSEIGNE SAINT THOMAS
Il est descendu aux enfers
Comme on l'a montré, la mort a consisté, pour le Christ
comme pour tout homme, en la séparation de l'âme et du corps, mais la divinité
était si indissolublement unie au Christ-homme, que bien que le corps et l'âme
du Christ se fussent séparés, la divinité resta parfaitement unie et au corps
et à l'âme du Christ. C'est pourquoi le Fils de Dieu était présent avec son
Corps au tombeau et il est descendu aux enfers avec son âme (Cf. S. Thomas.
Summa theol. III pars, qu. L, art. 51).
Le Christ est descendu aux enfers avec son âme pour quatre
raisons.
1. La première est :
Pour supporter tout châtiment du péché et expier ainsi toute
la faute. Or le châtiment du péché était non seulement la mort du corps, il y
avait aussi un châtiment pour l'âme parce que le péché était également dans
l'âme et pour que 1'âme soit punie en perdant la vision de Dieu; punition des
fautes pour lesquelles aucune satisfaction n'avait encore été offerte. C'est
pourquoi, avant la venue du Christ, tous, même les saints patriarches
descendaient aux enfers après leur mort. Pour prendre sur lui tout le poids de
la punition qui pesait sur l'humanité pécheresse, non seulement le Christ a
voulu mourir, il a voulu encore que son âme descende aux enfers. C'est pourquoi
il est dit au psaume 87, 5 : « On me compte parmi ceux qui descendent dans la
fosse, je suis comme un homme à bout de forces, libre parmi les morts. » Les
autres en effet y étaient comme esclaves, mais le Christ comme un homme libre.
2. Voici une deuxième raison :
De cette descente du Christ aux enfers : pour venir en aide
à tous ses amis. Car il avait ses amis non seulement sur la terre mais encore
dans les enfers (limbes). Est en effet ami du Christ quiconque a la charité. Or
aux enfers nombreux étaient ceux qui étaient morts avec l'amour et la foi en le
Sauveur futur, tels Abraham, Isaac, Jacob, Moïse, David et d'autres hommes
justes et parfaits. Et puisque le Christ nous visitait maintenant visiblement
sur cette terre et qu'il venait aussi à leur secours par sa mort, il a voulu
visiter également ceux des siens qui étaient aux enfers et venir à leur
secours, en descendant chez eux. « Je veux pénétrer toutes les parties cachées
de la terre et visiter tous ceux qui dorment et éclairer ceux qui espèrent en
le Seigneur » (Eccli. 24, 45).
3. La troisième raison :
Pour triompher parfaitement du diable. En effet on triomphe
parfaitement d'un autre quand non seulement on le vainc sur un champ de
bataille mais qu'on le poursuit jusque dans sa propre demeure et qu'on le prive
de son trône et de sa résidence. Or le Christ a triomphé du Mauvais, son ennemi:
il l'a vaincu sur la croix; aussi a-t-il dit: « C'est maintenant, le jugement
de ce monde; c'est maintenant, que le prince de ce monde va être jeté dehors»
(Joh. 12,31). Mais pour que son triomphe fût parfait, il a voulu lui enlever le
trône de son royaume et le lier en sa demeure, c'est-à-dire dans l'enfer. C'est
pourquoi il est descendu aux enfers, il l'a enchaîné et lui a ravi sa proie. «
Il a dépouillé les principautés et les puissances, il les a livrées hardiment
en spectacle, en triomphant d'elles par sa croix (Coloss. 2, 15). De même,
parce que le Christ a reçu la domination et la possession du ciel et de la
terre, il a voulu obtenir aussi le pouvoir sur l'enfer, pour qu'ainsi, selon la
parole de l'Apôtre « au Nom de Jésus tout genou fléchisse au ciel, sur la terre
et dans les enfers » (Philipp. 2, 10), et pour réaliser aussi la promesse du
Christ « en mon Nom vous chasserez les démons » (Marc. 16,17).
4. La dernière raison est :
Pour délivrer tous les Saints qui étaient aux enfers
(limbes). De même, en effet, que le Christ a voulu subir la mort pour délivrer
de la mort les vivants, il a voulu descendre aux enfers pour délivrer ceux qui
y séjournaient. C'est ainsi que le prophète dit déjà: « Dans le sang de ton
alliance tu retireras tes captifs de la fosse sans eau » (Zach. 9, 11 ). « O
mort, je serai ta mort, enfers, je serai votre désolation » (Osée 13, 14). En
effet, bien que le Christ ait anéanti complètement la mort, il n'a pas anéanti
complètement les enfers ; il ne les a que désolés, parce qu'il n'a pas délivré
tous ceux qui y étaient, mais seulement ceux qui étaient exempts de péché
mortel et du péché originel. Ceux qui avaient été circoncis avaient été
purifiés personnellement de ce dernier; avant la circoncision en avaient été
purifiés ceux qui n'ayant pas encore atteint l'usage de la raison, par la foi
de parents qui professaient la vraie foi, et ceux qui avaient atteint l'âge
adulte, par les sacrifices et par la foi au Sauveur à venir (Cf. Sum. theol.
III, qu. LXX> spec. art. 4 ad 1).
Mais ils étaient encore retenus aux enfers à cause du péché
d'Adam dont ils ne pouvaient être délivrés que par le Christ puisqu'ils étaient
de la race d'Adam. En revanche il y laissa ceux qui y étaient descendus avec un
péché mortel et les enfants non circoncis (cf. Sum. theol. III, qu. LII, art.
7) ; et c'est pourquoi il est dit : « O mort, je serai ta mort. » Le Christ est
donc descendu aux enfers pour les motifs que nous venons d'indiquer (Voir à ce
sujet la Somme de Saint Thomas) (III a pars, qu. 52)
http://mondieuetmontout.com/Menu-Marie-Anne-Lindmay-Ames-Du-Purgatoires.htm